Introduction. Les femmes en situation de handicap (FSH) sont deux fois plus à risque que leurs consœurs valides de subir de la violence conjugale (VC) (Savage et al., 2021). Ce risque s'accroît encore si elles sont issues de la diversité ethnoculturelle ou si elles cumulent d'autres types de facteurs de vulnérabilité (origine socio-culturelle modeste, non-accès à l'éducation etc.) (Taft et al., 2021). Par ailleurs, la violence commise à l'endroit des FSH revêt des formes multiples, dont certaines sont consubstantielles à la situation de handicap (dénigrement quant aux fonctions perdues, privation d'aide, refus de soin etc.). Problématique. L'intrication complexe de ces enjeux contextuels et structurels singularise la trajectoire de sortie de violence des FSH en ce qu'elle est notamment sujette à l'inaccessibilité des ressources et lieux d'accueil, l'inadéquation des services proposés aux réalités individuelles de chacune ou encore la méconnaissance par les professionnels de ses particularités. Par le biais d'une analyse ancrée dans les sciences de l'occupation (Stadnyk et al., 2010), nous avons cherché à comprendre comment la VC impactait les différentes occupations des FSH (participation et rôles sociaux/familiaux, accès aux activités de la vie quotidienne telles que se loger, travailler ou prendre soin de soi) afin de générer une compréhension précise des besoins en matière d'accompagnement, de protection et de soutien des capacités d'autodétermination des FSH survivantes de VC. Méthode. Cette étude s'inscrit dans une démarche de recherche action-participative, intégrant l'ensemble des partis prenantes à titre de collaborateur.rice.s Des entretiens semi-dirigés (n=11) conduits auprès de FSH survivantes de VC résidants au Québec ont été analysés et thématisés de façon indépendante puis conjointe par les chercheuses au projet (Paillé & Mucchielli, 2021). Les résultats des analyses ont été soumis aux collaborateur.rice.s pour amendements (démarche de member-checking). Des liens réguliers ont été tissés et entretenus avec les organismes territoriaux « pour et par » œuvrant en faveur de l'inclusion des personnes en situation de handicap (INEEI-PSH[1], RAPLIQ[2]). Cette double contribution permet de nous inscrire à la fois au cœur des réalités sociales et organisationnelles de la problématique et au plus proche du savoir expérientiel des femmes. Résultats. Tels que suggéré par de précédents travaux (Ballan & Freyer, 2020), les résultats confirment que les occupations constituent un site prépondérant de violence à l'endroit des FSH et que le rétablissement d'un équilibre occupationnel constitue un levier à mobiliser dans le contexte de sortie de VC. Les femmes livrent de nombreuses pistes et recommandations à l'intention des intervenants du secteur médico-social, des structures d'accueil et des instances décisionnelles. Il ressort nettement que les approches de type communautaire sont à privilégier dans une perspective d'autonomisation et de développement des capacités de résilience par la pair-aidance. La pertinence d'un accompagnement centré sur les occupations est discutée pour favoriser l'équilibre occupationnel des survivantes et soutenir ainsi leur trajectoire de sortie de violence.
[1] INEEI-PSH : Institut National pour l'Équité, l'Égalité et l'Inclusion des personnes en situation de handicap
[2] RAPLIQ : Regroupement activistes pour l'inclusion Québec
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