Evoquer la mort en situation de handicap évolutif. De l'impensé à l'œuvre utile.
Emmanuèle Auriac-Slusarczyk  1@  , Anne-Laure Ramelli  2  , Claire-Cécile Michon  2  
1 : Activité, Connaissance, Transmission, éducation
Université Clermont Auvergne
2 : Centre National de Ressources Psychologique, Filière BRAIN-TEAM
Centre National de Ressources Psychologique, Filière BRAIN-TEAM

Axes : 3 & 5

Mots clefs : Maladies (rares) du cerveau ; PSP ; directives anticipées ; inéluctable ; temporalité ; autonomie ; relation neurologue-famille- patient ; suivi psychologique.

Contexte. Les maladies du cerveau (filières Brain-Team) engendrent des symptomatologies diverses, parmi lesquelles le handicap reste souvent majeur et évolutif. Après une approche de la temporalité (directives anticipées DA) et l'inéluctable à partir du cas d'école de la paralysie supra- nucléaire progressive (P.S.P., voir Auriac-Slusarczyk, 2020/2a/b, 2022), l'introduction d'ateliers pratiques sur les DA confronte les psychologues à l'acculturation nécessaire des neurologues hospitaliers ou en cabinet privé sur cette question d'actualité[1].

Problématique. Le clivage sociétal autour du tabou de la mort, la méconnaissance de la loi sur l'intéressement possible aux DA des citoyens, médecins et neuropsychologues (Auriac-Slusarczyk & Lassalas, 2019 ; Auriac-Slusarczyk, 2021) portent actuellement préjudice aux patients comme aux aidants de malades polyhandicapés : défaut de parole, motricité, cognition, aptitudes sociales, déroute émotionnelle. Le psychologue est au cœur de ces problématiques pour déjouer les freins avec un ancrage en psychothérapie systémique (Elkaïm, 1989) qui favorise l'émancipation du patient par-delà son handicap (Ramelli & Michon, 2023).

Méthodologie. Suite aux besoins d'information des patients atteints de PSP, graduellement handicapés et leurs familles, consignés, traités au sein des assemblées générales de l'association de malades PSP France[2], retenus dans le livret de présentation de la maladie[3], les psychologues de la filière Brain-Team ont engagé des formations dans un programme AIDAN, au sein duquel la question de l'autonomie et de l'anticipation des patients par rappot à leur mort, l'inéluctabilité du trépas, est apparue incontournable. La formation (deux sessions conduites en 2022) a consisté à élaborer un module « penser la fin, remettre du lien », en distanciel sur une journée complète, avec 6 à 12 participants par session. Trois thématiques sont abordées : 1.les DA, 2.les différents renoncements et 3. la communication avec le proche malade.

Résultats. Une capsule vidéo, élaborée sur la base d'une ambition d'éducabilité possible, souhaitable des soignants et familles, portant sur les DA, servira de support commenté. De même, les réactions des participants relèvent : les (1) changement de représentations et l'envie de lever le tabou y compris pour les soignants; (2) conscience que penser la mort d'autrui est indissociable de penser la sienne ; (3) vif besoin d'aide à communiquer en couple et clarifier dernières volontés vs. DA.

Discussion. Le dépassement des craintes ordinaires (ou supposées comme telles) face à la mort, qui en matière de perte progressive d'autonomie réclament l'inventivité et l'accompagnement psychologiques peut être atteint via la triangulation réussie patient-famille-neurologue. La mort, certaine, travaillé grâce au handicap ouvre à ce que les morts (futurs) œuvrent à une meilleure survie qui dépasse le rituel du deuil au profit d'une protection émancipatrice via les discours, dispositions et dispositifs avant et après le trépas (Despret, 2023). Soigner la mort (Auriac-Slusarczyk et al., 2022a/b) avec un soubassement de communication non violente (Rosenberg, 1999) est une clef de consolation (André, 2022) où le handicap pourrait devenir le moteur d'émancipation positive de nos sociétés. Loin d'entraver, la mort libère.



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