SESSION (4). Le recours aux trajectoires (auto)biographiques dans les Deaf Studies : dimensions méthodologiques, épistémologiques et politiques d'une recherche émancipatrice
Andrea Benvenuto De La Cruz  1@  
1 : Centre d'études des mouvements sociaux
Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

En partant de différentes sources d'enquête (autobiographies, entretiens, archives) mobilisées dans les recherches en sciences sociales et humaines spécialisées dans les langues des signes et les cultures sourdes, nous interrogerons les dimensions politiques, épistémologiques et méthodologiques du recours aux récits de soi (témoignages, autobiographies, biographies) et aux méthodes ethnographiques qui veulent rendre compte de la vie des personnes sourdes par elles-mêmes. Depuis les recherches de la première vague des Deaf Studies où l'on prête sa plume pour réparer le tort fait aux sourds quant aux possibilités de faire entendre leur propre « voix » (Lane, 1991), où l'auteur fait parler un narrateur sourd, Laurent Clerc (1785-1869), enseignant et pionnier de l'éducation des sourds américains, jusqu'au développement du genre biographique et autobiographique investi par les auteurs et autrices sourd·es depuis le 19e siècle, en passant par la revendication de la place que les chercheurs et chercheuses sourd·es devraient occuper dans la recherche les concernant, pour ne mentionner que quelques-unes des voies possibles, l'enjeu paraît être de taille. Pour réparer les torts on peut choisir le chemin de « donner » une voix aux sans voix. Les Deaf Studies de la deuxième vague, quant à eux, revendiquent le fait de parler en leur nom propre et produisent ainsi leurs discours avec leurs propres normes académiques (https://acadeafic.org/tag/deaf-academics/).

Cette session s'intéressera aux différentes manières de mobiliser la parole des personnes sourdes dans la recherche en sciences sociales, que ce soit au travers la mobilisation de récits de soi, des enquêtes ethnographiques ou de l'engagement des personnes sourdes dans la recherche. Comment rendre compte du rapport des chercheur·es (qu'ils ou elles soient sourd·es ou entendant·es) à leur objet d'enquête ? Quelle est la réception, depuis la propre communauté sourde, de ces partis pris épistémologiques et théoriques ? Qu'est-ce que les autobiographies écrites par des personnes sourdes nous disent-elles des processus de réparation et d'émancipation ? Au-delà d'une simple quête de réparation des torts, ces questions interrogent les manières que les « sans voix » inventent pour s'émanciper des modes de dire ou d'écrire des autres, interrompant ainsi les logiques de l'exclusion ou de l'impossibilité, mais aussi, les significations de ce qu'on peut entendre en termes d'engagement des chercheur·es et de leurs recherches avec leurs propres objets et terrains. La session réunira quatre interventions :

 De la mobilisation du genre biographique dans la recherche sur l'histoire sourde. Fabrice Bertin (CEMS, EHESS)

 Ce que l'enquête autobiographique donne à voir comme processus de réparation-émancipation. Andrea Benvenuto (CEMS, EHESS)

 Récits du grandir sourd : perspectives de recherche dans le monde de l'enfance sourde. Tamara Dmitrieva (CNE, EHESS)

 Enquêter auprès des personnes sourdes, enquêter en tant que chercheur Sourd : dépasser la frontière entre soi-même et les autres, même si ces autres ces sont mes pairs. Olivier Schetrit (CEMS, EHESS)



  • Poster
Personnes connectées : 1 Vie privée
Chargement...