Cette proposition de communication s'inscrit dans l'axe 5 « Recherches participatives et émancipatrices ». Il s'agira de rendre compte de la démarche transdisciplinaire mobilisant trois domaines - les arts plastiques, la sociologie et les Deaf Studies - dans le cadre de la thèse en cours. Cette recherche effectuée en partenariat avec l'Institut National Audiovisuel (INA) porte sur les représentations des personnes sourdes dans l'espace télévisuel des années 1950-1970.

La démarche développée sera discutée du point de vue de son inscription dans la recherche participative et émancipatrice, et ceci de deux manières : d'une part, par le positionnement de la chercheuse, et d'autre part, par le développement de la méthodologie qui ouvre un espace de parole aux personnes sourdes.

D‘abord, cette recherche peut être qualifiée comme située (Haraway 2007), car menée par une chercheuse sourde. La vision sourde (deaf insight) incorporée par l'expérience sociale de l'être sourd offre des perspectives à la recherche (Sanchez 2017). D'ailleurs, cet insight permet à la chercheuse d'avoir une relation privilégiée avec les participants sourds. En effet, nous partageons une expérience similaire concernant l'oppression dans l'espace public, ou le fait d'être le seul sourd dans la famille (deaf same) (Kusters, Meulder et O'Brien 2017).

Ensuite, dans le cadre de la recherche présentée, la réflexion est menée sur la méthodologie originale permettant de rendre la parole aux sourds, dans leur langue naturelle, la langue des signes. Cet espace de parole est d'autant plus important vu la place marginale de la langue des signes et des personnes sourdes dans la société française pendant la période étudiée. Si le corps sourd est visible dans les archives étudiées, il reste sans parole, les figures d'autorité s'exprimant à la place des personnes sourdes et à leur propos. Le choix de la méthode de la vidéo élicitation, qui consiste à inciter les personnes sourdes à commenter les images des archives de manière libre, répond à une ambition de réparation, rejoignant le paradigme des Deaf Studies.

De plus, les sourd.es possèdent une culture visuelle forte, du fait de leur visuocentrisme (O'Brien et Kusters 2017), ce qui rend pertinente cette méthodologie s'inscrivant dans la tradition de sociologie visuelle. La méthode utilisée fera l'objet de description plus détaillée.

Après les séances de vidéo élicitation, la matière filmique deviendra des pièces vidéo. Ces créations donneront à voir des personnes signantes s'exprimant entre elles et permettront ainsi d'investir dans un espace du monde de l'art qui ne sont peu représenté par les personnes sourdes.