Groupes d'Entraide Mutuelle : penser les impensés des politiques sociales
Jean-Yves Barreyre  1@  
1 : EHESP-ARENES
École des Hautes Études en Santé Publique [EHESP], CNRS : UMR6051

Problématique :

La création et la reconnaissance juridique et sociale des GEM depuis 2005 en France a permis de créer des liens d'entraide et de solidarité entre personnes vulnérables et de les « déconfiner » dans leurs territoires de vie, de faciliter leur vie sociale en tant qu'habitant à part entière. En 2019, les adhérents des GEM ont dû faire face, comme l'ensemble des français, à la pandémie caractérisée par un « confinement » et des mesures restrictives de déplacement et de vie sociale, aux antipodes de la mission des GEM. En 2022, la recherche participative nationale du CNIGEM sur « le pouvoir d'agir des GEM à l'épreuve de la crise sanitaire » a soulevé le voile des « impensés » des politiques sociales dans la conception et la mise en place de ces dispositifs citoyens.

Méthodologie :

 La recherche participative s'est construite en deux phases, entre les chercheurs et les représentants du CNIGEM : Première phase : enquête nationale par questionnaires, reposant sur 3 questionnaires différents (adhérents, adhérents membres des CA, salariés-bénévoles-parrains-délégués de gestion des GEM). 1000 participants 13 régions françaises et 3 DOM.Seconde phase : focus groups, dans trois régions (Nouvelle Aquitaine, Ile de France, Bretagne). 300 participants. 1300 personnes ont participé activement à cette recherche participative.

Résultats :

L'étude révèle notamment ce que les concepteurs et promoteurs des politiques sociales et médico-sociales avaient « laissé en friche », délégué à la mise en œuvre des GEM. Nous insisterons dans cette communication, sur un paradoxe entre les moyens débloqués par la collectivité publique pour que les services spécialisés opèrent un virage inclusif et les attendus démesurés de celle-ci sur les missions des GEM avec des moyens proportionnellement infimes : la collectivité publique accompagne la transformation des structures spécialisées en mobilisant les CREAI, l'ANAP, l'HAS, la CNSA, en finançant des expérimentations, etc. Mais les professionnels des institutions sanitaires et sociales ont peu d'expériences concrètes de ce travail « avec » les personnes, dans leurs espaces ordinaires de vie et leurs institutions, et se tournent vers les GEM, 16 ans d'âge pour les plus vieux, à peine 1,2 salariés par GEM, sans fédération solide, sans reconnaissance de compétences particulières inscrites dans une profession singulière ou une fonction reconnue Et cela afin que les acteurs des GEM leur montrent ou expliquent, si ce n'est le fondement, mais au moins la méthode, les règles et les postures suffisamment éprouvées pour construire un corpus, une posture éthique et une déontologie qui leur permettent de s'accorder avec les orientations politiques actuelles. Que révèle ce paradoxe ?

 

Biblio indicative (hors 3500 signes)

ANCREAI (2017) Rapport Évaluation qualitative des effets produits par les GEM sur les situations de vie de leurs adhérents, étude commanditée par la DGCS et la CNSA

Barreyre J.Y., Fiacre P., Bourdaleix A.(Déc. 2022), Le pouvoir d'agir des GEM à l'épreuve de la crise sanitaire, CNIGEM, Financ. CNSA, Fondation de France

Fiacre P, Marabet B, Soubie A, (2018) Étude sur les Groupes d'entraide mutuelle (GEM) de la région Nouvelle-Aquitaine CREAI Nouvelle-Aquitaine, ARS Nouvelle-Aquitaine

Godrie B., Rivet C., « Inégalités épistémiques et réduction identitaire : ce que l'entraide en santé mentale fait aux récits de la maladie », Corps, n° 18, 2020

Troisoeufs A., « Jouer aux normaux entre malades ». Expériences des troubles psychiques et normalités négociées dans les groupes d'entraide mutuelle, Anthropologie et Santé, 20/2020

 


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